L’inflation, on connaît : c’est une hausse générale et durable des prix qui se traduit par une perte du pouvoir d’achat. En France, elle est passée de 1,5% à 6,8% entre juillet 2021 et juillet 2022.
Mais avez-vous déjà entendu parler de la pinkflation ? Contraction de pink (rose) et inflation, ce terme désigne le même phénomène, mais appliqué aux femmes. Ou quand l’augmentation des prix touche en priorité les produits et services destinés à un public féminin…
Inflation : les femmes davantage pénalisées
Selon l’Insee, malgré une inflation galopante, les prix des vêtements pour enfants sont actuellement en baisse (-0,9 %). Serait-ce le cas pour tous les autres types de vêtements ?
Pas du tout : selon une étude du journal suisse NZZ am Sonntag, réalisée sur la base de l’indice des prix à la consommation de l’institut Comparis, le prix des vêtements a augmenté de 0,3% pour les hommes, de 0,34% pour les enfants et de 6,51% pour les femmes en l’espace de 20 ans. Ce phénomène est appelé pinkflation, soit la hausse des prix des produits que l’on trouve au rayon femme.
Pour s’en apercevoir, il suffit de faire un petit tour au supermarché. Par exemple, la chaîne de supermarchés Leclerc vend des chaussettes de tennis à 3,11 euros le lot au rayon homme… tandis que ces mêmes chaussettes sont affichées à 5 euros au rayon femme.
Mais il y a d’autres raisons pour lesquelles l’inflation impacte plus lourdement les femmes. Plus souvent responsables des achats du foyer, les femmes passent plus de temps dans les magasins, et consacrent une part plus importante de leurs revenus à l’achat de biens non durables, comme la nourriture, le papier toilette ou les protections hygiéniques. Or, ces biens sont les premiers touchés par la hausse des prix. Aux Etats-Unis par exemple, entre juin 2021 et juin 2022, le prix des marques de tampons haut de gamme a augmenté de 2 %, tandis que celui des marques standard a augmenté de 11 %.
Enfin, les femmes sont payées en moyenne 24% de moins que les hommes ; elles sont aussi plus susceptibles d’être en situation de pauvreté et d’élever leurs enfants seules. En règle générale, l’inflation a donc des effets négatifs plus importants sur elles.
Une extension de la taxe rose
La taxe rose, ou pink tax en anglais, est une expression qui désigne la différence de prix entre des produits et des services similaires, selon qu’ils soient marketés à destination des femmes ou des hommes. Ou, pour le dire plus simplement, il s’agit du surcoût concernant les produits et services destinés aux femmes.
Une différence qui ne s’explique pas vraiment : si l’on reprend l’exemple des vêtements, ils sont fabriqués à partir des mêmes matières et dans les mêmes usines, qu’ils soient à destination des femmes ou des hommes. Mais les femmes, victimes d’une pression plus forte sur leur apparence, sont des cibles faciles pour les industriels.
« Les clientes semblent réagir de manière moins élastique aux augmentations de prix des articles de mode. En d’autres termes, elles font aussi du shopping lorsque les prix des vêtements s’envolent », explique ainsi le média NZZ am Sonntag. Du pain bénit pour les marques.
Du déodorant, des rasoirs et des vêtements plus chers pour les femmes
Le média TF1 a récemment enquêté sur cette fameuse taxe rose. Selon ses conclusions, il existe aujourd’hui une différence de 44 centimes entre un déodorant pour femme et un déodorant pour homme, de 1 euro entre des chaussettes pour fille et des chaussettes pour garçon, et de 4 euros entre une doudoune rose et une doudoune bleue.
Autres exemples : des rasoirs pour hommes moins chers (alors qu’ils sont en tout point similaires), et un anti-inflammatoire vendu en pharmacie à destination des femmes (dans une jolie boîte rose !) pour 49 centimes de plus que l’original… Même des objets banals du quotidien comme le dentifrice, les cahiers, les stylos ou les sonnettes de vélos (!) sont souvent genrés, et donc soumis à une différence de prix.
Une situation que dénonçait dès 2014 le collectif féministe Georgette Sand : « En France, les femmes gagnent 24% de moins que les hommes. […] Le marketing genré en segmentant le marché entre filles et garçons véhicule des stéréotypes, pousse à la surconsommation et inflige une taxation spécifique aux femmes ».
Comment se protéger de la pinkflation ?
On est d’accord, le constat est rageant. Mais il existe quelques moyens de résister à cette hausse de prix genrée…
Le meilleur moyen de garder du pouvoir d’achat en temps d’inflation ? Apprendre à bien négocier son salaire, notamment si l’on change de poste (ou, si l’on reste dans son entreprise, ne pas hésiter à demander une augmentation).
Mais aussi apprendre à investir, et placer son argent sur des supports rémunérateurs plutôt que de tout laisser sur un Livret A (ou pire, sur son compte-courant !).
Enfin, lorsque c’est possible, privilégier les produits prétendument “masculins” (exemple typique : les rasoirs) , qui font exactement la même chose… pour un prix moins élevé ! 50 centimes par-ci par-là peuvent sembler peu, mais sur le long terme, ces différences de prix peuvent finir par constituer une somme importante.